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Réussir la transformation dans l’assurance : incarner les ambitions dans la réalité opérationnelle
Déc 10, 2025 Insurance , Article , Software
By Irina Ovcinicov

Dans le secteur de l’assurance, comme dans chaque secteur en mutation rapide, la transformation n’est plus un projet stratégique ponctuel — c’est une construction continue. L’innovation s’accélère, les attentes des clients augmentent, les réglementations évoluent constamment. La transformation ne se prépare pas une fois pour toutes : elle doit s’inscrire durablement dans la capacité d’adaptation continue des assureurs.

 

La plupart des assureurs disposent déjà des bons piliers : cadres Agile, équipes internes solides, partenaires expérimentés pour compléter les capacités, outils modernes. Et pourtant, les programmes de transformation échouent encore trop souvent : perte de vitesse, blocages, complexité paralysante.

 

Pourquoi ? Parce que la réussite ne repose pas sur la technologie ni sur les process, mais sur l’alignement entre la stratégie, les personnes et l’exécution, avant le lancement officiel.

 

Tout commence par des fondations partagées et solides.

L’illusion du progrès 

 

Trop souvent, les programmes de transformation ressemblent à des dispositifs bien huilés : discours maîtrisé, processus fluides, plans bien présentés. Mais derrière cette apparente fluidité, les points de blocage demeurent :

 

  • Des métiers sous-impliqués… ou surprotégés.
  • Un sponsoring affiché, mais peu incarné.
  • Un flou persistant sur les rôles, responsabilités et processus de décision.

Résultat : les équipes exécutent, mais sans cap partagé. Les directions métiers se démobilisent, perdent confiance, et se détachent — alors que leur engagement actif est précisément ce qui manque pour avancer.

Ce qui permet réellement de livrer 

 

Pour sortir de ces transformations “à vide”, les assureurs doivent opérer quatre virages essentiels :

 

      1. Un sponsoring métier qui conduit vraiment la trajectoire

 

La transformation exige un leadership assumé, pas seulement une validation de principe. Concrètement :

 

  • Un mandat clair, avec des objectifs stratégiques déclinés en résultats métiers mesurables. Trop souvent, les objectifs sont bien définis au niveau stratégique, mais l’effort d’atterrissage — c’est-à-dire la déclinaison en résultats attendus pour le métier et les étapes pour y parvenir — reste insuffisant.
  • Un engagement visible et continu de la direction, pas seulement lors du lancement, mais tout au long du programme.
  • Une communication forte et répétée sur le “pourquoi” — l’urgence de transformer, les risques à ne rien faire. Ce message doit être porté clairement par les dirigeants et répercuté à tous les niveaux managériaux. Sans cette transmission cohérente, les équipes métiers ne perçoivent ni l’urgence ni le sens de leur engagement, et peinent à se mobiliser pleinement.
  • Une présence active et répétée lors des démonstrations de fonctionnalités développées, dans les arbitrages et les comités — il s’agit de montrer l’exemple, pas de déléguer.

Sans cela, les programmes dérivent. Et aucun intégrateur, aussi compétent soit-il, ne peut compenser un métier désengagé.

 

      2. Un alignement des plans à l’échelle de l’organisation

 

Le manque d’alignement entre priorités métiers et modes de delivery IT est une source majeure de friction. Pour y remédier :

 

  • Construire les plans ensemble, et non en silos. Cela prend du temps, mais c’est le seul moyen d’avoir une vision de « bout en bout » (« end to end ») sur l’effort, la complexité, et la séquence logique.
  • Cartographier et gérer les interdépendances dès le démarrage — et les réévaluer régulièrement, car il constitue un facteur clé de succès pour assurer un delivery aussi fluide que possible.
  • Investir dès le début dans des façons de travailler communes, un rythme partagé, et des boucles de feedback rapides et lisibles.

Ce temps investi au départ se transforme ensuite en vitesse et qualité durable.

 

      3. Une culture de transparence et de responsabilité partagée

 

Les programmes échouent rarement faute intentions — mais faute de responsabilité partagée, de comportements défensifs, et de processus d’escalade flous.

 

Quelques principes essentiels :

 

  • La sécurité psychologique et la transparence sur les risques doivent être incarnées par les dirigeants.
  • L’escalade doit être normalisée, et la pause stratégique détabouisée. Il ne s’agit pas de chercher des coupables, mais d’objectiver les problèmes, leurs impacts et les options de résolution.
  • Parfois, une remise à plat culturelle est nécessaire pour casser les jeux politiques et rétablir un dialogue sincère.

Ce changement de mindset est exigeant — mais il structure davantage l’organisation que n’importe quel nouvel outil.

 

Et pour que cela fonctionne, tous les acteurs doivent jouer collectif : IT, métiers, éditeurs, consultants, intégrateurs. Les contrats doivent encourager cette logique “one team” : partage des risques, de la valeur et de la coopération plutôt que la confrontation.

 

      4. Des fondations solides avant la recherche de vitesse

 

Aller vite trop tôt est l’erreur classique. Cela conduit à des dispositifs fragiles, à l’épuisement des équipes, à des livrables instables.

 

Les intégrateurs savent démarrer vite — c’est leur métier.
Mais la vraie question est ailleurs : vos équipes internes peuvent-elles suivre ce rythme ?

 

Avant d’accélérer :

 

  • Évaluez votre capacité réelle de delivery — disponibilité des experts, maturité des leaders, clarté de la gouvernance.
  • Décidez ensuite des ajustements nécessaires (renforts, rythme, ou adaptation du périmètre) et imposez à vos partenaires de s’y aligner.
  • Formalisez un modèle opérationnel complet : gouvernance, gestion des risques, pilotage, droits décisionnels.
  • Testez d’abord un pilote à faible risque : périmètre simple, impact mesuré, apprentissage fort.
  • Préservez la flexibilité contractuelle, via des clauses de pause stratégique ou de recalibrage.

Mieux vaut avancer lentement au début pour accélérer durablement ensuite.

Rien de nouveau — mais trop souvent négligé

 

Soyons honnêtes : rien de ce qui précède n’est révolutionnaire. Ce sont des bonnes pratiques connues, citées, validées. Vous les avez entendues cent fois. Nous les avons dites cent fois. 

 

Mais elles sont trop souvent considérées comme du “confort”, pas comme des prérequis. On veut démarrer vite — et on construit un dispositif trop fragile pour la complexité réelle. 

 

Nous avons vu des programmes suspendus après plusieurs mois… pour tout remettre à plat. Mieux vaut consolider les fondations une fois, puis capitaliser. 

Revenir aux fondations

 

Chaque dirigeant d’assurance devrait se poser ces trois questions : 

 

  • Transformons-nous pour créer de la valeur durable… ou pour donner l’impression d’avancer ? 
  • Nos équipes avancent-elles ensemble… ou simplement en parallèle ? 
  • Confions-nous les décisions à ceux qui ont vraiment les moyens d’agir ? 

La transformation, ce n’est pas une posture : c’est une responsabilité collective, vécue au quotidien — du Comex jusqu’au terrain. 

Il est temps de transformer nos intentions en résultats.

Authors of the article

         Irina Ovcinicov - Lead Consultant

Perspectives technologiques et marché

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